Archiver pour avril 2018
Posté le 16 avril 2018 - par Seydi Diamil
Le développement économique dans la philosophie de Mawdo / Dr Seydi Diamil Niane
« Je dois le quitter pour essayer de gagner ma vie avec le travail de la terre », disait autrefois Elhadji Malick Sy pour des raisons sur lesquelles nous reviendrons. Ethique, responsabilité et dignité, ces trois mots pourraient résumer les propos du Sage de Tivaoun et nous informent sur sa philosophie de développement économique dont l’analyse est l’objet de ce papier.
Aborder la question du développement économique dans la pensée de Mawdo nous oblige à replacer la question dans le cadre général de son œuvre réformatrice pour la perfection des liens verticaux et horizontaux et la réhabilitation de l’éthique individuelle et collective.
Les liens verticaux lient l’humain au divin. Leur perfection doit avoir la sincérité pour base. Ne disait-il pas que la sincérité était la parure de l’aspirant sur la voie de la perfection spirituelle ? (Al-sidq fahwa zinatul murîdi). Une fois la sincérité acquise, l’aspirant peut facilement cheminer vers la conquête de la crainte de Dieu. A ce propos, rappelons-nous la manière dont cheikh Ahmed Tijānī définissait le soufisme : « se conformer aux ordres de Dieu et s’éloigner de ses interdits comme Il le souhaite Lui-même et non pas comme tu le souhaites ». En somme, le cheikh fondateur de la Tijāniyya appelle à la perfection des liens verticaux, laquelle perfection est au centre de la démarche d’Elhadji Malick Sy. Cela va de pair, bien évidemment, avec la réhabilitation de l’éthique individuelle qui empêche l’aspirant d’avoir recours à la tricherie quelqu’en soit la nature.
Le deuxième point fondamental est la perfection des liens horizontaux et la réalisation de l’éthique collective. C’est cela qui crée une sorte de pacte sacré entre les hommes dans le seul but d’avoir la satisfaction de Dieu. Pour ce faire, les fils conducteurs ne doivent être autres que le respect et la quête de la dignité. C’est ainsi qu’Elhadji Malick Sy s’est attelé au développement de la mystique du travail qui s’est concrétisée avec sa vaste opération de culture arachidière. Ne sommes-nous toujours pas en train de vanter les souvenirs de Ndiarné et de Djaksao ?
L’éthique, c’est vivre avec et dans la dignité sans compter sur autre que le Très-Haut. Elhadji Malick Sy en fut l’exemple le plus accompli et la manifestation la plus parfaite. Voilà ce qu’Elhadji Mâmoune Ndiaye, petit neveu de Mor-Massamba-Diéry Dieng, raconta à Elhadji Ravane Mbaye :
Elhadji Malick demanda un jour à ma mère Anta Dieng alors qu’ils se trouvaient tous deux à Tivaoune : « Sokhna Anta, sais-tu pourquoi je suis allé à Ndiarné ? » Ma mère ayant répondu par la négative, il poursuivit : « J’étais allé une fois chez un boutiquer de Saint-Louis pour chercher des bougis à crédit. Le boutiquer, après avoir accepté, refusa. Arrivé à la maison, je me mis à raconter l’affaire aux autres. Or, Bâye Mor-Massamba-Diéry, informé, je ne savais comment, remit un franc à un disciple qui alla acheter le paquet de bougies pour moi ».
« Pendant la nuit, je me mis à réfléchir sur ma situation sociale et aboutis à la conclusion suivante : « Bâye Massamba-Diéry m’héberge avec ma femme et se fait l’obligation de payer mes dettes. Je dois le quitter pour essayer de gagner ma vie avec le travail de la terre. Voilà, conclut-il, le pourquoi de mon installation à Ndiarné.[1] »
Quelle élégance ! L’homme est beau quand il est animé par une conscience de dignité. La dignité est belle lorsqu’elle est portée par un homme de Dieu comme Elhadji Malick Sy. Ce récit, nous pouvons le dire, résume bien la philosophie de développement économique d’Elhadji Malick Sy qui s’inscrit dans le cadre général de la perfection des liens verticaux et horizontaux. Rester chez Bâye Massamba-Diéry aurait été une atteinte grave à sa conscience et une remise en cause de son éthique. De ce récit, nous pouvons retenir les leçons suivantes :
1) La solidarité entre les enfants d’une nation, voire d’une civilisation, doit être chérie. Voilà que le disciple saint-louisien d’Elhadji Malick Sy, informé de la situation, a tout de suite pris un franc pour répondre au besoin de l’homme de Tivaoun.
2) L’assistanat ne doit pas être une règle de vie. Chacun doit travailler pour le développement économique et pour la marche de la civilisation humaine. Elhadji Malick Sy n’a-t-il pas profité de la situation qu’il venait de vivre à Saint-Louis pour déménager à Ndiarné en vue de contribuer au développement de sa terre ?
3) L’intérêt général doit primer sur l’obsession de l’enrichissement personnel. Rappelons à ce propos que, en même temps qu’il cultivait la terre, Elhadji Malick Sy cultivait les esprits. « Ce stratège, ce Généralissime en Chef, placé à la tête d’une armée pacifique de plusieurs centaines de milliers d’âmes, disait Iba Der Thiam, n’a jamais eu d’autres armes que son chapelet, son verbe et sa plume. » Parce qu’un bon développement économique nécessite la présence de femmes et d’hommes pour qui l’intérêt général doit primer sur l’enrichissement individuel, Elhadji Malick Sy appelle, par son exemple, à la formation intellectuelle et la réforme spirituelle des fonctionnaires. Son chapelet et sa plume étaient ses armes.
A ces trois points viennent s’ajouter deux autres non moins importants pour le développement économique : la redistribution des richesses et la lutte contre le blanchiment d’argent ou l’optimisation fiscale. Aussi a-t-il émis un avis juridique rendant l’aumône sur les bénéfices de l’arachide obligatoire. Cette mesure fut révolutionnaire au point de heurter d’autres jurisconsultes de son époque. Dans un langage plus contemporain, cette position d’Elhadji Malick Sy pourrait être considérée comme une opération contre le blanchiment d’argent et pour la redistribution des richesses, deux conditions nécessaires à un bon développement économique.
Dr Seydi Diamil Niane
Dakar, le 22 novembre 2017
[1] Elhadji Ravane Mbaye , Le grand savant Elhadji Malick Sy ; pensée et action, Albouraq, 2003 , p.132.
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
Seydi Diamil Niane plaide pour une approche humaniste du dialogue inter religieux au Sénégal
Le Docteur en islamologie, M. Seydi Diamil Niane plaide pour une approche humaniste du dialogue inter religieux au Sénégal. A cet effet, à la place du « vivre ensemble, il invite les acteurs à aller vers le « faire ensemble » qui, à son avis, est plus actif. Ce plaidoyer a, d’ailleurs, guidé les débats du panel que OSIWA, en collaboration avec le Cadre Unitaire de l’Islam au Sénégal, a organisé ce jeudi 15 mars, sur l’Harmonie interconfessionnelle au Sénégal érigée en modèle pour la Sous-Région ouest-africaine.
« Ressources endogènes pour la tolérance inter et intra confessionnelle au Sénégal ». C’est le thème autour duquel OSIWA, en collaboration avec le Cadre Unitaire de l’Islam au Sénégal, a convoqué la réflexion, ce jeudi 15 mars à Dakar. La chargée du Bureau Pays Sénégal d’OSIWA, Mme Hawa Ba précise qu’il s’agissait de faire une introspection pour évaluer le « bon vivre » au Sénégal matérialisé par la parfaite cohabitation entre les confessions.
Il était également question d’examiner les éléments exogènes et endogènes de cette question tout en relevant les défis qui se posent à l’harmonie pour améliorer le modèle mais aussi le mettre en exergue à l’aune des mutations sociales.
Universitaires, chercheurs, acteurs de la société civile, religieux, entre autres, après avoir loué l’exemplarité du modèle sénégalais en matière de tolérance inter et intra confessionnelle n’ont pas manqué d’alerter sur la nécessité de renforcer les acquis face aux défis du moment.
Le Docteur en islamologie, M. Seydi Diamil Niane qui a profité de cette brèche réitère l’existence du besoin pour une coexistence active dans la société sénégalaise.
A cet effet, il plaide pour une approche humaniste du dialogue inter religieux qui à son avis, ne laisse personne de côté. Une idée consolidée par le Dr Mamadou Dia qui pense que la relation entre la religion et la spiritualité doit être revue pour mieux ressortir l’humanisme des confessions.
Dr Niane estime ainsi qu’à la place du « vivre ensemble », il faut aller vers « le faire ensemble » qui est plus « actif ». Une invite qui consiste à amener les aspirants du dialogue à s’entendre sur des actions communes et « veiller à ce qu’il n’y ait aucune exclusion », précise-t-il.
Cela renvoie à un dialogue islamo-chrétien avec comme objectifs des actions concrètes et bénéfiques pour tout le monde.
Ce postulat du Dr Niane qui se qualifie d’ « intellectuel rebelle » a presque orienté les débats de cette journée de réflexion.
Source : allafrica.com
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
[APS] Seydi Diamil Niane préconise une académie sénégalaise de la pensée islamique
L’universitaire et chercheur sénégalais Seydi Diamil Niane a souligné la nécessité d’une académie sénégalaise de la pensée islamique, pour une meilleure vulgarisation du travail scientifique des “oulémas” sénégalais.
Cette structure devrait permettre “une meilleure appropriation et une vulgarisation des ouvrages des savants sénégalais’’, tout en apportant “une réponse doctrinale à l’extrémisme violent”, a-t-il soutenu.
M. Niane procédait jeudi à la présentation de son ouvrage intitulé “Moi musulman, je n’ai pas à me justifier : manifeste pour un Islam retrouvé”, une cérémonie qui s’est déroulée au Centre de recherche ouest africain (WARC, en anglais).
L’auteur, chargé de recherches à l’Institut Timbuctu, a révélé avoir entamé la rédaction de cet ouvrage après les attentats du Bataclan à Paris ; le 15 novembre 2015, en réponse à une amie française qui l’avait ainsi interpellé en ces termes : “Oh Djiamil, qu’est ce vous avez fait encore ?”, une manière de l’associer à “cette violence accomplie par d’autres” au nom de sa religion.
La directrice du Laboratoire genre de l’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN), la sociologue Fatou Sarr Sow, a loué “la vaste culture” de l’auteur et “la qualité rédactionnelle” de son livre, dont le “message profond traduit dans un style simple (…) est une invite à la recherche du savoir pour une meilleure compréhension du texte coranique”.
Le travail et le profil intellectuel de Djamil Niane, titulaire d’une thèse de doctorat en études arabo-islamiques à l’Université de Strasbourg (France), donnent des raisons d’espérer en “une jeunesse saine, debout, capable de perpétuer et défendre l’islam des fondateurs”.
Source : APS
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
Seydi Diamil Niane sur le plateau de Média France TV
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
Seydi Diamil Niane invité de Coexister Hebdo sur Radio Judaica de Strasbourg
Cliquer pour écouter l’émission
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
Vidéo – Cérémonie de présentation du livre « Moi, Musulman, je n’ai pas à me justifier »
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
Dr Seydi Diamil Niane invité de l’émission Par l’Art – Mourchid TV
Posté le 9 avril 2018 - par Seydi Diamil
Lettre à Serigne Mansour Sy Djamil : Serigne Bi Djeureudjeuf par Dr Seydi Diamil Niane
Serigne Bi Djeureudjeuf.
C’est un homme intègre, intellectuellement bien construit, citoyen follement amoureux de son pays qui s’est exprimé. En tant que guide religieux, khalife de Serigne Moustapha Sy Diamil, vous avez, comme à votre habitude, rallumé la flamme de dignité qui commençait à être réduite en cendre par des vendeurs d’illusion.
Serigne Bi Djeureudjeuf,
En vous attaquant à cette « mafiocratie politico-religieuse », qui a décidé de se taire face à l’injustice institutionnelle et institutionnalisée, au crime organisé par des criminels protégés, vous nous avez montré que la solidarité religieuse ne doit pas empêcher de prendre nos responsabilités et de dire NON « à l’asservissement de l’homme par l’homme », comme le disait Fanon, quand dire NON s’impose.
Serigne Bi Djeureudjeuf,
Djeureudjeuf d’avoir dit que, en pleine traite négrière, des savants et hiérarques de l’islam ont pu se servir, de manière malhonnête certes, du Coran et de la tradition prophétique pour légitimer la déshumanisation de nos ancêtres. De ce point de vue, Sama Serigne di sama soppé, votre discours de ce 8 avril est fondateur et est fondamental.
Fondateur parce qu’il rompt le silence d’un monde musulman qui a décidé de se taire, pendant de longues années, alors que des hommes étaient en train d’être vendus par des hommes. Fondateur parce qu’au moment où des pays occidentaux ont voté des lois pour dire que « la traite négrière était crime contre l’humanité », aucun pays arabe n’a jugé nécessaire de condamner la traite transsaharienne arabo-musulmane, beaucoup plus longue que celle dite transatlantique. N’osons même pas comparer le nombre des victimes des deux crimes.
Fondamental puisqu’en comparant le silence de la « mafiocratie politico-religieuse » sur l’affaire Khalifa Sall à la même mafiocratie qui, par des fatwas honteuses, légitimait l’esclavage, vous avez tracé une feuille de route intellectuelle qui devrait guider le pas des taalibés. La feuille de route pourrait se résumer ainsi : plus jamais il ne faut se taire face l’injustice. Et si quelques-uns des nôtres se fâchent, TANT PIS.
En ayant eu le courage politique et intellectuel de vous attaquer à « la mafiocratie politico-religieuse », vous étiez pertinemment conscient du risque de fâcher quelques-uns des vôtres, quelques-uns des nôtres, qui ont décidé, pour des raisons que personne n’ignore, de se taire.
Pour votre courage politique, pour la profondeur de votre pensée, pour votre engagement à ne jamais sacrifier la dignité humaine, je vous dis Serigne bi Djeureudjeuf.
Dr Seydi Diamil Niane
Dakar, le 9 avril 2018.
Posté le 6 avril 2018 - par Seydi Diamil
Islam et extrémisme violent : réponse à la réponse de Sokhna Maï Mbacké Djamil / Dr Seydi Diamil Niane
Chère amie, ma Diamil préférée,
Le 18 janvier 2018, je t’adressai une lettre portant sur le rapport entre l’islam et l’extrémisme violent suite à un texte que tu avais publié sur ta page Facebook quatre jours plus tôt. Sans surprise, ta réponse ne tarda pas à venir. Je m’en réjouis et te fais part de ma fierté de te voir, ma très chère Sokhna Maï, relever le défi que je t’avais lancé. Cependant, je ne suis pas entièrement convaincu par tes explications.
Je n’aurais aucune difficulté à reconnaître que l’islam bénéficie d’un traitement un peu particulier dans les médias et chez les producteurs du discours politique en Occident. Surtout lorsqu’il s’agit d’aborder la question de la violence. D’ailleurs, je dis précisément dans mon dernier livre la chose suivante : « je tiens à le préciser, les musulmans n’ont pas à se justifier d’un acte dont ils ne sont pas responsables, de la même façon que les chrétiens ne peuvent pas être pointés du doigt à propos de la guerre en Irak. Que George Bush se réclame du christianisme, très bien, mais aucun chrétien n’a à se justifier des actions engagées par une personne qui se réclame de sa religion ! De la même façon, les bouddhistes ne sont pas responsables de la persécution des Rohingyas par des moines qui se réclament du bouddhisme. [1]» Je fais aussi miens ces propos qu’Edward Saïd couchait sur papier en 1981 : « naturellement, le massacre de Jonestown, le terrible attentat à la bombe d’Oklahoma ou la dévastation de l’Indochine n’ont jamais été assimilés au christianisme, ni à la culture américaine ou occidentale dans son ensemble. Ce type d’analogie est réservée à ‘‘l’Islam’’.[2]» De ce point de vue, je suis entièrement d’accord avec toi. En revanche, je pense que par honnêteté intellectuelle, nous devons accepter et avouer que nos textes, dans une certaine mesure, ont une certaine responsabilité dans ce qui nous arrive ! Je m’explique.
Pour preuve, je t’ai cité ces deux propos tenus, le premier par Ibn ‘Abd al-Wahhab, le second par Rabī‘ al-Madḫalī :
1) « celui qui ne répond pas à la prédication par la preuve, nous le faisons plier par l’épée [3]»
2) « Si votre but est de faire triompher la parole divine, Kalimat Allah, vous n’avez qu’à aller dans un État européen, que ce soit l’Italie, la France ou l’Espagne. Eux sont des vrais impies. Allez avec votre armée dans un pays impie (kâfir), pêcheur (fâsiq) par l’impiété de son gouvernement et son peuple. Demandez-leur de rentrer dans l’islam […], s’ils acceptent, que la grâce en soit rendue à Dieu. S’ils refusent, demandez-leur de payer la jizya. S’ils refusent encore, alors le jihad devient légal…»[4].
Dans ta réponse, tu m’avais reproché de vouloir limiter l’islam à l’interprétation wahhabite. Je te cite : « Alors, si je comprends bien ton approche, les paroles de ces deux individus qui, je te l’accorde, donnent une justification juridique (dans leur juridiction qui n’est pas celui de tous les musulmans) à l’extrémisme et à la violence. Mais une justification loin d’être « religieusement » fondée car allant à l’encontre de l’essence de la parole coranique. Lorsque Abd al-Wahab professe ce qui suit : « Celui qui ne répond pas à la prédication par la preuve, nous le faisons plier par l’épée », il contredit tout simplement le Saint Coran dans son essence fondamentale. »
Très chère, je te l’aurais accordé avec beaucoup de plaisir si seuls les wahhabites défendaient cette position que tu considères religieusement infondée. Ma Djamil préférée, sais-tu que la position dominante de l’école malikite ne dit pas autre chose ? Voilà ce que Ibn Abî Zayd al-Qayrawânî, auteur de la Risala qui est l’un des livres les plus importants pour les adeptes d’Imam Malick et qu’on étudie dans tous les majâlis du pays :
والجهاد فريضة يحمله بعض الناس عن بعض وأحب إلينا أن لا يقاتل العدو حتى يدعوا إلى دين الله إلا» أن يعاجلونا فإما أن يسلموا أو يؤدوا الجزية وإلا قوتلوا وإنما تقبل منهم الجزية إذا كانوا حيث تنالهم أحكامنا فأما إن « بعدوا منا فلا تقبل منهم الجزية إلا أن يرتحلوا إلى بلادنا وإلا قوتلوا
Ma jumelle adorée, me diras-tu que la position de l’école malikite, à laquelle étaient affiliés Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, Seydi Elhadji Malick Sy, Qadi Majakhaté Kala, Mawlânâ Bay Niasse, etc, est « coraniquement infondée » ?
Que penses-tu de ce hadith, rapporté par Boukharî et par Mouslim ?
مِرْتُ أَنْ أُقَاتِلَ النَّاسَ حَتَّى يَقُولُوا: لَا إِلَهَ إِلَّا اللهُ، فَمَنْ قَالَ: لَا إِلَهَ إِلَّا اللهُ، عَصَمَ مِنِّي مَالَهُ، وَنَفْسَهُ إِلَّا بِحَقِّهِ، وَحِسَابُهُ أُ» «عَلَى اللهِ
« Il m’a été ordonné de combattre les hommes jusqu’à ce qu’ils témoignent qu’il n’est de divinité que Dieu et qu’ils croient en moi [en tant que prophète de Dieu] et en ce que j’ai apporté ». Cette parole du Prophète, jugée authentique par l’immense majorité des savants musulmans, ne va-t-elle pas dans le sens de la position d’Ibn ‘Abd al-Wahhâb et de Madḫalī ?
Allons plus loin, très chère amie. Tu convoques le Coran, je te cite : « Y’a t-il une source plus importante que le Coran en matière de religion islamique ? Je ne pense pas ! Alors pourquoi se fonder sur les visions personnelles d’un ou de plusieurs individus pour dire que l’islam détient une liaison avec l’extrémisme violent alors que le Coran stipule le contraire ?« Les serviteurs du Tout Miséricordieux sont ceux qui marchent humblement sur terre, qui, lorsque les ignorants s’adressent à eux, disent : « Paix ». 25/63 ».
Ce même Coran ne dit-il pas la chose suivante ? « Combattez ceux qui ne croient ni en Allah ni au Jour dernier, qui n’interdisent pas ce qu’Allah et Son messager ont interdit et qui ne professent pas la religion de la vérité, parmi ceux qui ont reçu le Livre, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation par leurs propres mains, après s’être humilies » (9/29).
Chère Maï, source de fierté, ma jumelle et binôme, tu sais parfaitement que mon propos n’est pas de légitimer la violence faite au nom de l’islam, ni d’appeler mes coreligionnaires à se justifier. J’ai écrit un livre sur ce sujet. Mais lorsque je t’écrivais, dans ma première lettre, que « Face à cette justification juridique et religieuse de l’extrémisme violent, pointer du doigt les médias occidentaux au lieu de reconnaître que le problème est aussi islamique était-il la meilleure chose à faire ? », je voulais tout simplement dire qu’il faut un débat intra-islamique pour combattre toute lecture ou réflexion qui pourrait appeler à la négation de la dignité humaine.
Dans l’attente de ta réponse, ton jumeau, binôme et frère, Seydi Diamil Niane
Dakar, le 6 avril 2018.
Pour lire ma première lettre : http://lesouffleduvent.unblog.fr/2018/01/18/lettre-a-sokhna-mai-mbacke-diamil-dr-seydi-diamil-niane/
La réponse de Sokhna Maï Mbacké Diamil : http://maimbackedjamil.com/2018/02/21/reponse-a-seydi-djamil-nianeislam-et-extremisme-violent/
[1] Seydi Diamil Niane, Moi, musulman, je n’ai pas à me justifier, Paris, Eyrolles, 2017, p.53.
[2]Edward Said, L’Islam dans les médias, Actes Sud, 2011, p. 85.
[3] Hamadi Redissi, Le pacte de Nadjd : Ou comment l’islam sectaire est devenu l’islam, Paris Seuil, 2007, p.94.
[4] Cité par Bernard Rougier, « Introduction », dans Qu’est-ce que le salafisme?, Paris, PUF, 2008, p. 16.