Archiver pour juin 2019
Posté le 28 juin 2019 - par Seydi Diamil
#IlsOntMarquéMaVie 2) « Maître »
Dans la continuité de notre série « Ils ont marqué ma vie », à laquelle vous aurez droit tous les vendredis, je viens vous parler d’une personne qui a été au cœur de ma formation intellectuelle et ne cesse de l’être pour mon cheminement spirituel. Je l’appellerais « Maître ».
Fils de Serigne Maodo Dia, grand Muqaddam de la Tijāniyya, Serigne Moustapha Dia est le premier à m’avoir initié au droit malikite. C’était en 2002. A l’époque, j’étais en classe de CM1 à l’école franco-arabe Manar al-Houda, basée à Louga. Mais pour renforcer mes connaissances, surtout religieuses, mon père a eu l’intuition de m’amener chez Serigne Moustapha Dia pour que, pendant les weekends, au lieu de passer mon temps à jouer au foot, j’aille étudier les bases de la religion.
On a commencé avec le livre d’Al-Akhḍarī, puis Al-‘Achmāwiyya. Les tous premiers qu’on étudie dans les écoles traditionnelles sénégalaises, après le Coran. Ça a continué ainsi, pendant 8 ans. En 2010, j’avais une maîtrise des classiques du droits malikites, une bonne base en théologie acharite et au soufisme. Sans oublier les écrits linguistiques et grammaticaux, qui vont d’Ibn Durayd à l’Alfiyya d’Ibn Mālik. Ce que je n’ai pas dit, c’est que le « Maître » est un encyclopédiste. Il est autant à l’aise dans le fiqh que dans la philosophie ou la grammaire et les sciences du hadith. Il connaît au bout des doigts toutes les exégèses du Coran.
C’est vraiment lui qui a fait naître chez moi le gout du savoir. Amoureux des belles lettres, il me poussait souvent à me servir de la prosodie arabe qu’il savait manipuler, pour composer des poèmes. Beaucoup ne le savent pas, mais j’ai eu à écrire quelques textes poétiques en arabe. Le mètre basīṭ est mon préféré. Il m’arrive aussi de me servir du ṭawīl et du kāmil. Mais ça, c’est une autre histoire.
C’est son père, Serigne Maodo Dia, qui lui-même porte le nom d’Elhadji Malick Sy, qui m’a initié à la Tijāniyya en 2008. J’avais dix sept ans. Mais c’est aussi l’année où j’ai commencé à me verser dans l’apprentissage des écrits d’Elhadji Malick Sy. Et c’est le « Maître » qui m’en faisait les commentaires.
Cela me suivra à vie. La preuve ? En master II, le titre de mon mémoire fut « La quête d’intercession du Prophète comme cheminement spirituel dans la poésie d’Elhadji Malick Sy ». Plus tard, il sera publié, aux éditions de l’Harmattan, sous le titre de La voie d’intercession du Prophète dans la poésie d’Elhadji Malick Sy. Aujourd’hui, l’un des rares articles scientifiques, consacré à la poésie d’Elhadji Malick Sy, est de notre plume. Ce qu’il faut savoir, c’est que si je n’avais pas été formé par lui, jamais je n’aurais été capable de faire ce travail qui fera de moi, et malgré moi, une « référence » académique quand il s’agit de parler de l’œuvre d’Elhadji Malick Sy.
Son père est décédé en 2010. Et comme le veut la tradition, en juillet 2011, alors que j’étais en vacance au Sénégal, j’ai renouvelé mon initiation auprès de lui. Il est aujourd’hui au cœur de mon cheminement. Et quand je risque de me perdre, mon premier reflexe est de l’appeler. Avec ses mots, il réussit toujours à m’attraper. Il y a beaucoup d’autres choses que ce papier ne saura porter.
Je m’en arrête là.
Merci « Maître ».
Posté le 21 juin 2019 - par Seydi Diamil
La poésie d’Elhadji Malick Sy Entre désir, souffrance et cheminement spirituel
- Auteur: Niane (Seydi Djamil)
- Résumé: À partir du xvie siècle, des courants soufis ont développé la doctrine de la « voie muḥammadienne » qui met la dimension mystique de Muḥammad au centre du cheminement des disciples. La Tiğāniyya fait partie ce courant. En se référant à la poésie d’Elhadji Malick Sy, ce texte analyse la manière dont il exprime son désir de se rendre, pour son cheminement spirituel, aux Lieux-saints de l’Islam et de la Tiğāniyya dont il fut un maître, ainsi que la façon dont l’attente du voyage mystique s’exprime.
- https://classiques-garnier.com/licarc-2018-litterature-et-culture-arabes-contemporaines-n-6-l-attente-la-poesie-d-elhadji-malick-sy.html
- Pages: 191 à 203
- Année d’édition: 2018
- Revue: LiCArC (Littérature et culture arabes contemporaines), n° 6
- ISBN: 978-2-406-08529-4
- ISSN: 2270-7220
- DOI: 10.15122/isbn.978-2-406-08529-4.p.0191
- Éditeur: Classiques Garnier
- Date de parution: 23/11/2018
- Périodicité: Annuelle
- Langue: Français
Posté le 21 juin 2019 - par Seydi Diamil
Soufisme et wahhabisme : querelle des textes ou choc des lectures?
Résumé :
Tous les musulmans se réclament du même et unique Livre Saint : le Coran. Certains en ont toutefois tiré, essentiellement, deux façons fort différentes de le comprendre et de le suivre. Les uns, soufis, se présentent comme la voie intérieure. Les autres, wahhabis adoptent une lecture littéraliste des textes scripturaires. Entre le wahhabisme et le soufisme, les lectures s’affrontent. La querelle des textes et le choc des lectures entre le soufisme et le wahhabisme qui, en dehors des cinq piliers de l’islam, ont peu de points communs est d’autant plus intéressante qu’elle est le reflet du corps social de l’islam aujourd’hui. Cet ouvrage est destiné à permettre de mieux comprendre ce conflit sempiternel et engager un vrai débat : Certains auraient-ils le monopole de la vérité en islam ? Loin d’être une religion monolithique donc, l’islam aurait-il plusieurs voix ? Décryptant les arguments des uns et des autres, l’auteur présente et analyse tous les points de divergences entre ces deux courants.
http://www.orient-lib.com/A-56739-soufisme-et-wahabisme-que…
Posté le 21 juin 2019 - par Seydi Diamil
#IlsOntMarquéMaVie 1) « Si Maman si »
« Si Maman si »
Comme promis, et ce pour tous les vendredis désormais, je viens vous parler, pour leur rendre hommage, de personnes qui ont marqué ma vie et qui ont été, pour moi, sources de motivation et d’inspiration.
Je commence par le commencement. Ma première source d’inspiration. Maman, la douce et tendre à la beauté parfaite.
Née en 1967 à Ndiang Codé Niane, le village même où, 28 ans plus tard, elle entendra mon premier cri, Khady Niane a perdu ses parents alors qu’elle était assez jeune. C’est sa tante, qui se rendra à Kaïb Dia après son mariage, qui prendra soin d’elle. Jeune, elle a intégré l’école coranique du village. Depuis, le Coran ne l’a jamais abandonnée. Elle ne l’a plus abandonné non plus. La lecture du livre saint de l’islam était sa source de bonheur.
Bonheur, voilà le nom de l’étoile qui fit que, un jour, elle a accepté de partager la vie de papa à qui elle resta fidèle toute sa vie. Tendre, elle était connue pour la facilité qu’était sienne d’être source de solutions pour toutes les personnes qui venaient la solliciter, solliciter son avis et son appui.
Travailleuse, Maman était celle qui s’est vraiment occupée de notre éducation et de notre vie. Papa, comme d’autres de sa génération, vivait plus en France en tant qu’émigré. On le voyait assez peu.
Maman s’occupait du foyer mais aussi de l’aspect financier de notre existence. Elle gérait la quincaillerie Seydi Djamil, nom de notre boutique qui se situe au marché de Louga. Elle était l’unique et la seule femme du marché à faire ce métier d’hommes. Je me souviens d’ailleurs d’un jour où, un vieil homme, rentrant à la quincaillerie pour acheter du ciment, fit demi tour, dès qu’elle à vu maman, avec des mots qui résonnent encore dans ma tête : « ah, allons chercher ailleurs, c’est une femme qui gère ici ». Féministe sans jamais s’en revendiquer, elle lui rétorqua avec son magnifique sourire : « est-ce une raison de ne pas acheter chez-moi ? » Monsieur est devenu, ensuite, l’un de ses meilleurs clients.
Amoureuse de Serigne Babacar Sy, elle était fidèle à la voie Tijaniyya qu’elle reçut de la part de Serigne Mawdo Dia. Celui-même qui, plus d’une décennie plus tard, m’initia à la noble tariqa.
Elle était prête à sacrifier sa vie pour notre bonheur. Quand on lui amenait de bonnes notes, elle dépensait tout pour nous gâter. C’est là que j’ai compris que notre réussite était sa seule raison de vivre.
Hélas, l’ange de la mort ne lui a pas laissé le temps de nous voir grandis. Un samedi d’octobre 2015 a sonné la fin du match. Je venais de m’inscrire en thèse. Ma sœur venait tout juste de trouver un travail. C’était le lendemain de la achoura. Comme habituée, elle assista à la prière récitée à cette occasion, fit le tour du quartier pour « demander pardon à ses voisins » (c’est une tradition). Deux heures plus tard, elle s’envola suite à une crise cardiaque. La dernière fois qu’on a discuté, elle me parlait de mariage. Je suis fier et heureux d’avoir épousé la fille dont elle rêvait. Celle qu’elle aimait, sans jamais me le dire.
Ce jour là, « mon cœur a déménagé », comme le dirait France Gall
Marseille, le 21 juin 2019